L’audience a repris vendredi matin avec les plaidoiries des deux avocats de la défense. Ils ont tous les deux et avec force insisté sur le caractère rigoureusement passionnel du geste qui avait conduit à la mort de la victime. Chacun dans leur style. L'une des deux plaidoiries c'est révélée extrêmement intéressante parce que prononcée par l'un des avocats les plus cultivés que j'ai eu l'occasion de rencontrer. Cet homme, atypique, qui se dit heureux de vivre de la peinture, et de ne faire ce métier que pour la beauté de sa mission. Pendant 1 heure, il a multiplié les références littéraires, philosophiques, théâtrales.
C'est un véritable plaideur, comme on n'en fait plus.
Ceci étant écrit, je ne suis pas certain de l'efficacité sur des jurés d'un tel exercice. Nombres de références ont du leur passer bien au-dessus de la tête, et on se demande parfois dans un tel exercice, qui est celui qui prend le plus de plaisir, celui qui le donne, ou celui qui le reçoit.
Avant de vous donner l'issue de ce procès, je ne peux m'empêcher de vous faire part des deux perles, prononcées par le même témoin, à quelques minutes d'intervalle.
Parlant de la relation que l'accusé entretenait avec sa sœur, il dira :
« S’agissant d'une relation entre adultes, je ne voulais pas m'initier »
Puis, quelques instants plus tard, et un peu sous le sceau de la confidence, il confiait à la cour et aux jurés :
« Mais au bout d'un temps, les langues se sont dépliées. » !
La cour et les jurés se sont retirés pour délibérer à 11:50.
À 14:00, le verdict tombait :
L’accusé a été condamné à 22 ans de réclusion criminelle.
À l'heure où j'écris ces lignes, il ne m'est pas possible de vous assurer que nous venons d’écrire la dernière page judiciaire de cette malheureuse histoire.
L'accusé bénéficie en effet d'un délai de 10 jours pour éventuellement faire appel de cette décision, ce qui conduirait à la tenue d'un nouveau procès.
Il est certain que même si c'est le droit le plus absolu, pour l'accusé, de contester la décision qui vient d’être rendue, il n'en reste pas moins que recommencer une telle épreuve est insupportable pour les parties civiles.
À l'occasion d'un interrogatoire, l'accusé avait un jour précisé que quelque soit la condamnation qui serait prononcée contre lui, il l'accepterait.
Il ne serait pas le premier à faire une promesse qui n'est pas tenue.
Je vous tiendrai bien évidemment informé. J'espère que cette manière que j'ai eue de vous faire m'accompagner pendant ce procès vous aura intéressé. Je recommencerai l'expérience.