Cela commence un peu comme une oeuvre de la Fontaine et pourtant ce n'est pas une fable.
Un paysan, qui a commencé à travailler sur les terres de son père à l'age de 14 ans, après une année de labeur bien remplie, se laisse convaincre par quelques amis d'accepter la gérance d'une société coopérative dont l'objet était de commercialiser les fruits et légumes produits par les associés de la société, une Sica, comme ils disent...
Le yoyo des cours des produits maraichers aidant, la société fait de mauvais résultats, mais à l'unanimité, les associés décident de poursuivre l'activité et tente de redresser la barre.
Lorsque la trésorerie commence à faire défaut, il va privilégier le paiement des producteurs, au détriment notamment de l'organisme social dont la société dépend, comme le font 100% des dirigeants d'entreprises en difficultés.
Comme aucun accord ne pourra être trouvé avec cet organisme, le paysan, contre l'avis de tous, déposera le bilan et le tribunal prononcera la liquidation judiciare immédiate, désignant un liquidateur.
Le procureur de la république et le liquidateur vont imaginer de rechercher la responsabilité personnelle de cet homme, dont le seul bien est la maison qui l'a vu naitre et son père avant lui.
Ce que l'on lui reproche ?
D'avoir pousuivi abusivement une activité déficitaire à des fins personnelles, et d'avoir , ce faisant, frauduleusement augmenté le passif de la société, comme ils disent...
Et cet homme, qui s'est levé tout les matins de sa vie pour travailler sans savoir si son labeur lui permettrait de manger à sa faim se voit questionner par un homme dont le statut le place à des années lumières de telles préoccupations.
Le paysan, dont le seul tort est d'avoir trimé, et de n'avoir pas pu faire les études qui lui aurait permis de comprendre ce à quoi il s'engageait en acceptant la gérance de cette société, regarde le juge lui poser des questions dans un français qu'il comprend à peine, et ne comprend pas.
Pour lui, les gens qui se retrouve au tribunal, comme il dit, ce sont les malhonnêtes, pas les maladroits ou les malchanceux.
Et lui la seule chose dont il est certain c'est qu'il n'est pas malhonnête.
Et pourtant il a compris qu'il va peut être perdre sa maison, son toit, son outil de travail, tout.
Alors il repense au journal télévisé d'hier soir ou il a vu un reportage sur des banques et des gens qui jouaient avec des milliards d'euros, et qui en avaient perdu quelques uns.
On disait qu'ils avaient fait des faux, qu'ils avaient trichés.
Il repense à ces hommes politiques qui sont condamnés pour s'être laissés soudoyer et à qui il n'arrive finalement pas grand chose, puisqu'ils sont toujours là.
Et cette nuit là, comme toutes celles qui suivront, il se demandera pourquoi lui, qu'a t il fait de si mal, pour mériter un tel traitement.
L'histoire du paysan ne fera jamais le vingt heures, ils sont trop nombreux.
Avant de juger un paysan, un juge devrait toujours se rappeler que lui aussi, il mange, et peut être grace à des gens comme celui que l'on a placé bien vite au ban de l'infamie.
Réveillez vous !